Entre les annonces de Google et d’OpenAI, l’utilisation de l’IA dans la recherche redessine irrémédiablement les pratiques sur Internet. Aux agrégateurs traditionnels comme les moteurs de recherche et les médias sociaux, s’ajoutent donc les moteurs avec IA. Pour les veilleurs, le challenge se déplace de la synthèse à la vérification des résultats de recherche.
Il y a quelques jours, OpenAI volait la vedette à Google qui présentait pourtant sa Keynote, événement phare des groupes de la tech. La rumeur, qu’Open AI ne s’est pas empressé de démentir, annonçait le lancement de son propre moteur de recherche. Finalement, ce dernier a (en attendant?) présenté un nouveau modèle gratuit qui intègre le web et les GPTs, des fonctionnalités jusqu’alors payantes (environ 20 €/mois). Si l’on ajoute la liste d’accords de licences avec les médias qui s’allonge chaque semaine, on comprend que l’ambition de ce dernier est réelle et se veut à la hauteur des attentes.
Les utilisateurs utilisent en effet les chats d’IA comme des moteurs de recherche et y font leurs recherches malgré le risque d’hallucination. La recherche d’informations fait ainsi partie des usages inattendus des modèles de langage, créés à l’origine pour deviner des suites de phrases. D’après une étude de The Verge, 53 % des utilisateurs et 61 % des Millenials utilisent les chats IA plutôt que les moteurs de recherche traditionnels pour faire leurs recherches.
De son côté, Google, qui représente encore près de 87 % de part de marché dans le monde, a annoncé le futur de Google SGE, son moteur de recherche enrichi à l’IA. Il s’appelle « AI Overviews » (« Aperçus IA ») et pourrait être disponible en France à la fin de l’année 2024. Cette version, qui utilise Gemini pour comprendre les requêtes, propose un résumé des résultats de recherche, notamment pour les recherches les plus complexes, ainsi que d’autres innovations comme les réponses sous forme d’images ou la catégorisation des résultats de recherche.
Mais surtout, Google présente son futur moteur comme suit : « Google fera la recherche sur Google pour vous ». Ce qui n’est pas sans rappeler la fonctionnalité « Browse for Me » (Recherche pour moi) du navigateur Arc (voir notre article Search : Arc ouvre la voie à de nouvelles pratiques de recherche, BASES N° 424, avril 2024). Mais si Google prévoit d’ajouter quelques liens à ses résumés de requêtes pour « aller plus loin », l’utilisation d’Arc a déjà montré aux utilisateurs français à quel point cliquer sur ceux-ci devient… inutile, voire superflu, y compris pour le professionnel de l’information.
Figure 1 : Avec Google Overviews, les résultats de recherche « aperçus » fournis par IA disposent de trois niveaux de réponse différents : original, simplifié ou développé.
Après « un monde sans sources » (voir notre article IA : la veille dans un monde sans sources, BASES N° 416, juillet 2023), le veilleur découvre donc un monde sans liens (ou presque), voire « sans clic », puisque les résultats disparaissent de la première page de recherche.
Certes, à la liste de liens à parcourir et à lire, succède donc une réponse immédiate, personnalisée. De quoi mettre fin à la surabondance de l’information par des résultats fournis sous forme de synthèse composée des sources (rarement identifiés) ayant servi à alimenter l’IA. Cela constitue aussi moins de saisie, moins d’onglets et plus de discussions avec un moteur de recherche.
Jusqu’à présent, l’écosystème de Google constituait un point d’entrée d’internet basé sur des liens vers le contenu des éditeurs. Et comme Google reste de loin la plus grande source de trafic sur le Web aujourd’hui, s’il « garde ce trafic pour lui-même » en répondant aux questions avec l’IA, ou « s’il remplace le web par lui-même », comme le notent certains observateurs américains, il est susceptible changer l’écosystème tel que nous le connaissons.
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