Depuis plusieurs années déjà, on entend régulièrement parler de la baisse de qualité de Google alertes. Quel est aujourd’hui l’intérêt de ce type d’outil pour la veille ? Google Alertes est-il réellement le meilleur de sa catégorie ? Ou bien faut-il se tourner vers des alternatives comme Talkwalker Alerts par exemple ?
Quand on souhaite mettre en place une veille concurrentielle, stratégique ou encore e-réputation on a le choix entre plusieurs approches.
La première consiste à identifier un certain nombre de sources pertinentes et à les mettre ensuite sous surveillance, via un bookmark ou outil de crawling web.
La seconde consiste à mettre en place des alertes par mots-clés (avec des requêtes plus ou moins complexes) dans différents outils comme les outils d’alertes Web (à l'image de Google Alertes), les plateformes de social media monitoring, les agrégateurs de presse, les bases de données professionnelles, etc. pour surveiller les nouveaux contenus publiés sur le Web ou dans les corpus pré-intégrés dans ces outils.
Ces deux approches sont complémentaires.
Et on retrouve ici les concepts de « veille cible» et de « veille radar» développés par le blogueur Christophe Deschamps où, dans le premier cas, on identifie des sources précises à mettre sous surveillance et, dans le second, on met en place des alertes par mot-clés sur le Web.
Avant d’explorer l’intérêt de ce type d’outils pour la veille, il convient de rappeler que ces outils comme Google Alertes interrogent de manière très large le Web ouvert dans ce qu’il a de pire mais aussi de meilleur.
Recourir à des outils comme Google alertes peut permettre au veilleur de sortir de l’univers qu’il connaît et qu’il maîtrise en lui faisant découvrir de nouvelles sources, de nouveaux acteurs, de nouvelles tendances ou d’éventuelles nouvelles thématiques.
Le périmètre de surveillance de ces outils d’alertes étant par définition très large, toute la difficulté consiste à ne pas se retrouver noyé sous l’information...
On conseillera donc d’utiliser ce type d’outil pour des requêtes précises, ciblées et non ambiguës.
Afin d’évaluer la qualité de Google Alertes, nous avons mis en place une veille dans le secteur des transports pendant une semaine sur le thème suivant : le marché des autocars longue distance en France aussi appelés les « Cars macron » afin d’obtenir des articles de fond, des informations sur les nouvelles lignes ou en projets, sur les principaux acteurs, des avis de voyageurs, etc.
Dans l’interface de Google alertes, nous avons tout d’abord créé une première alerte avec la requête suivante combinant des termes relatifs à ce moyen de transport et les noms des différents acteurs présents sur le marché :
"autocars macron" OR "cars macron" OR "bus macron" OR "autobus Macron" OR flixbus OR flexibus OR Megabus OR ouibus OR Starshipper OR isilines OR "cars longue distance" OR "bus longue distance" OR "autobus longue distance" OR "autocars longue distance" OR "bus low cost" OR "cars low cost" OR "autocars low cost" OR "autobus low cost"
Sur le moteur de Google, il existe une limite de 32 mots au niveau de la taille des requêtes. Dans Google alertes, il n’y a aucune mention d’une quelconque limite.
Cependant, nous avons eu le sentiment en visualisant les résultats que Google ignorait les derniers termes de notre requête. Nous avons finalement choisi de diviser notre requête en deux pour créer deux alertes.
D’autre part, comme nous faisions récemment le constat que, sur le moteur de Google, les longues requêtes booléennes étaient à proscrire et qu’il valait mieux entrer des requêtes courtes, nous avons voulu savoir s’il en était de même sur Google Alertes.
Nous avons donc créé une requête sur autocars macron, une autre pour bus macron, une autre pour Flixbus et ainsi de suite pour chaque terme et expression de notre requête.
Pour chaque alerte, nous avons fait le choix de recevoir une seule alerte par jour, de limiter aux résultats en français et surtout d’inclure tous les résultats et non « seulement les meilleurs résultats ».
Premier constat : il y a parfois un décalage entre les résultats présents dans l’alerte mail et ceux disponibles directement dans l’interface de Google Alertes.
Certains résultats sont par exemple inclus dans l’alerte mail du jour par email mais datés du lendemain dans l’interface de Google Alertes.
Autre inconsistance : lorsque l’on clique sur « afficher plus de résultats » en bas de son alerte mail, on arrive parfois sur l’alerte de la veille dans l’interface de Google Alertes sans qu’il soit possible d’accéder à l’alerte du jour. Et il faut parfois attendre plusieurs heures avant de pouvoir effectivement accéder aux résultats du jour du l’interface...
Autre élément de déception : la qualité des résultats.
Sur nos différentes requêtes, le taux de résultats peu pertinents par rapport à notre problématique s’élevait certains jours à plus de 50% avec de nombreux résultats issus de comparateurs d’itinéraires, de comparateurs de tarifs, de sites de petites annonces ou encore des résultats en allemand ou en anglais alors que nous avions spécifiquement indiqué le français.
Dernier constat et pas des moindres : nous avons pu noter des différences de résultats en fonction de la longueur de la requête.
Par exemple, nous avions systématiquement plus de résultats (en général 5 ou 6 résultats en plus) concernant Flixbus sur l’alerte simple flixbus que sur la longue requête "autocars macron" OR "cars macron" OR "bus macron" OR "autobus Macron" OR flixbus OR flexibus OR Megabus OR ouibus OR Starshipper OR isilines
Cela confirme ce que nous avions déjà pu remarquer sur le moteur de Google, à savoir que le nombre de résultats peut varier selon la formulation de la requête, et, ce même si les mêmes mots-clés sont bien inclus...
Nous avons ensuite décidé de reproduire le même test sur Talkwalker Alerts, qui est aujourd’hui la principale alternative gratuite à Google alertes.
Nous avons entré exactement les mêmes requêtes.
Talkwalker a également une limite dans la taille des requêtes, ce qui nous a contraint à couper notre longue requête booléenne en deux et à créer deux alertes.
Comme sur Google Alertes, nous avons fait le choix de recevoir une seule alerte par jour, de limiter aux résultats en français et surtout d’inclure tous les résultats et non « seulement les meilleurs résultats ».
Et cette fois-ci, le résultat est bien plus satisfaisant.
Tout d’abord, les alertes Talkwalker incluent des résultats issus de Twitter, ce qui n’est pas le cas de Google Alertes. Cependant, on constate qu’on obtient plus de résultats correspondants à la requête en allant interroger directement Twitter depuis son interface que dans l’alerte Talkwalker.
Les fonctionnalités de recherche offertes sont un peu plus poussées que sur Google alertes avec la troncature (pour remplacer un ou plusieurs caractères), l’opérateur de proximité ~n pour rechercher un terme à n mots maximum d’un autre, etc.
La majorité des résultats obtenus étaient pertinents et dans la langue choisie (sur une semaine, nous n’avons eu qu’un seul résultat en anglais et un seul en allemand, ce qui est beaucoup moins que Google).
Enfin, que l’on choisisse des requêtes booléennes longues ou des requêtes courtes avec un seul mot-clé ou expression, les résultats étaient les mêmes.
On notera qu’au bout de quelques jours d’utilisation de Talkwalker Alerts, nous avons reçu un email nous conseillant de passer aux Talkwalker Advanced Alerts, inclus dans la plateforme de veille payante Talkwalker avec plus de médias sociaux, plus de fonctionnalités de recherche, etc. Même si le résultat de notre test est satisfaisant, cet email a eu le mérite de nous rappeler que Talkwalker Alert est avant tout un produit d’appel pour la plateforme de veille payante Talkwalker.
A notre grande surprise, le nombre de résultats communs entre Google Alertes et Talkwalker Alerts était relativement faible. Certains jours, il n’y avait même aucun résultat commun entre nos alertes Google et nos alertes Talkwalker.
Sur une semaine de test, nous sommes passés à côté d’une ou deux informations pertinentes non présentes dans Talkwalker Alerts mais bien sur Google Alertes alors qu’inversement, ce sont des dizaines d’informations pertinentes que nous aurions manqué si nous nous étions limités à Google Alertes.
Dans notre exemple, le constat est sans appel : Talkwalker Alerts est bien plus performant que Google Alertes.
Les outils d’alertes Web sont sans aucun doute des compléments intéressants aux autres outils utilisés dans le cadre d’une veille, à condition de bien cibler sa requête.
Cependant, on ne peut baser l’intégralité de son processus de veille sur ces seuls outils, au risque de passer à côté de beaucoup d’informations pertinentes.
On ne saura ainsi se passer des outils de veille et de recherche professionnels comme les agrégateurs de presse ou plateformes de veille, qui offrent, pour la majorité, des corpus de sources qualifiées.
Auteur : Carole Tisserand-Barthole, Rédactrice en chef de BASES et NETSOURCES